Le lundi matin,
c’est le départ pour trois jours aux confins de la Champagne
et de la Bourgogne. Dans la voiture, on entasse vélos, sacs
de couchage, victuailles et quelques enfants. L’arrivée est prévue
deux heures et demie plus tard à Chessy Les Prés,
un gîte perdu en pleine forêt au nord-ouest de Tonnerre.
Une grande maison en U encadrant une immense pelouse, une chapelle, le
tout noyé dans la forêt. Voilà pour le cadre. Et puis
les couleurs de l’automne derrière les fenêtres. Une aile
entière accueille la troupe des 19 enfants et 13 adultes. Dès
notre arrivée, une activité fébrile règne en
cuisine pour nourrir la ribambelle de gamins affamés (à noter
une belle tentative de découpage des poulets). Puis répartition
des effectifs dans les chambres.
Je me prépare psychologiquement
pour l’atelier gâteau au chocolat que j’ai prévu de faire
au cours de ce mini-séjour.
L’après-midi, nous
nous rendons à Tonnerre pour voir la Fosse Dionne, une source
vauclusienne longtemps considérée comme magique. Son nom,
"Dionne" viendrait de divona (divine en latin). Il se peut également
que ce nom soit rattaché à la nymphe Dioné, océanide
de la mythologie grecque antique. À l'époque gallo-romaine,
cette source résurgente servait à alimenter en eau des habitants
de l'oppidum de Tornodurum, situé sur le plateau qui la surplombe.
C’est en 1758 que Louis D’éon la fait aménager en lavoir,
avec une toiture semi-circulaire et une double enceinte.
La Fosse Dionne n'a cessé
d'intriguer au cours des siècles : quelle est la provenance de ses
eaux ? Quelle est la raison de cet exutoire de forme curieuse et enfin,
peut-on sérieusement croire en l'existence d'un basilic ?
« Et puisque nous
sommes sur les termes de cette fosse d'Yonne, qui est une grande source
admirable pour montrer de l'antiquité et source d'icelle, se trouve
aux leçons de matines Saint Jean l'Abbé (…) et ayant disette
d'eau, il fût averti qu'au dit lieu il y avait un puits remply, et
un serpent Basilicq qui infectait le peuple. Lui même commence d'une
besche ou pioche à fouïr la terre au dit endroit d'où
sortit la belle et grande source d'eau que l'on y voit, et ce fait conjura
et fit mourir le dit serpent basilique, ensorte qu'il rendit ce lieu fréquent
et habitable. » (Extrait de l'Histoire de France, de Grégoire
de Tours, VIème siècle)
Résultat d'un circuit
complexe, la source forme en fait une vasque au fond de laquelle on peut
voir le départ d'une galerie haute de 2,5 m. qui s'arrête
à 28 m de profondeur sur un étranglement. Après quoi
la galerie se poursuit jusqu'à 360 m. de l'entrée et 61 m.
de profondeur. C'est l’une des sources de France les plus difficiles à
explorer en raison de ses étroitures, des tourbillons d'argile,
de la force du courant, de sa profondeur et de la succession de dénivelés
qui oblige à effectuer de nombreux paliers de décompression.
Plusieurs plongeurs y ont perdu la vie.
Le débit moyen annuel
est de 242 litres par seconde, mais la source est capable de crues violentes.
L'eau est issue d'un impluvium de 43 km² au sud de la ville, stockée
dans les multiples failles du calcaire, ce qui explique son débit
continu. Une partie de l'eau provient également de la perte de la
Laigne (près de Châtillon-sur-Seine) par un parcours souterrain
encore inconnu de plus de 40 km à vol d'oiseau. La Fosse Dionne
est ainsi la deuxième percée hydrogéologique de France,
après la fontaine de Vaucluse. (Je remercie ici Wikipédia
de m’avoir permis de reconstituer à la virgule près les dires
de Cédric ! )
Tout en visitant Tonnerre,
je repense un peu à mon atelier gâteau au chocolat mais
pas longtemps car nous avons rendez-vous au Château de Vaulichères,
à Épineuil, pour rencontrer un viticulteur qui doit nous
entretenir de ses vignes.
Nous partons donc à
30 et arrivons le même nombre à quelques kilomètres
de Tonnerre. Là, se trouve un joli village de quelques maisons vigneronnes
accolées à leur petite église, au milieu des vignes.
Le vignoble de Tonnerre était, jusqu’à la fin du 19ème
siècle, l'un des plus anciens et des plus importants de France,
et les vins produits y étaient d'une très grande qualité.
Le Clos de Vaulichères, ancienne propriété
de la famille Clermont-Tonnerre, était l'un des plus importants
domaines de la région ; il avait alors la réputation d'être
le meilleur du Tonnerrois. Mais cette fin de siècle vit le phylloxéra
décimer toute la viticulture française et notamment le Tonnerrois...
En 1990, Olivier Refait,
enfant de la région, retrouve ses racines, et entreprend de replanter
le vignoble sur les coteaux pentus du Domaine. Puis il acquiert 92 ares
de vignes plus âgées en appellation Chablis. Aujourd'hui,
le Château exploite, entre Pinot Noir et Chardonnay, un domaine de
8 hectares.
Le maître du Domaine
nous explique avec passion comment il élève ses vins : vendanges
manuelles, cuverie traditionnelle, fermentations à basse température,
écoulement des vins par gravité, utilisation partielle de
fûts neufs de chêne, diffusion de musique classique pendant
la fermentation… Malgré mon écoute particulièrement
attentive, je ne peux retransmettre la totalité des explications
du maître du Domaine car bientôt, le jardin résonne
des cris d’enfants réclamant force pains au chocolat et autres madeleines
dans la lumière dorée de cette fin de journée d’automne.
Une dégustation des crus Vaulichères achève enfin
la visite, pour les adultes qui font semblant de s’y connaître. Les
voitures repartent chargées de quelques caisses de vins.
Le soir, de retour au gîte
dans la forêt, alors que les grandes personnes s’affairent à
la préparation du repas, apparaissent soudain de terribles fantômes
nains et de toutes petites sorcières affligeantes. Le repas d’Halloween
fut horriblement délicieux et terriblement sanglant : "doigts
de sorciers", "croissants de presque pleine lune" et autres "cheveux
de sorcières" !!!
Le lendemain, départ
pour une balade en forêt. Les garçons organisent un
concours de celui qui trouvera le truc le plus encombrant à porter
(i.e. : une branche morte de 4 mètres de long). Admiration béate,
le nez en l’air devant les envolées d’oiseaux migrants. Récolte
de diverses feuilles et champignons pas comestibles. Traversée d’un
champ malgré les barbelés : les vaches chargent. Même
pas peur ! Après le déjeuner, une balade en vélo
mené de main de maître par Thomas épuise les plus grands
des enfants sur les routes bourguignonnes. Pendant ce temps, au calme,
on distribue toiles blanches et peinture aux plus petits, chargés
de réaliser des œuvres sur le motif.
Après avoir mûrement
réfléchi mon projet, je cuisine, enfin, un gâteau au
chocolat. Le soir, Jacques s’attache à faire découvrir
aux enfants le son de quelques percussions.
Enfin, le mercredi matin,
Annelise et Frédéric proposent aux enfants un atelier poésie
: il s’agit de fabriquer un texte en choisissant des bouts de phrases.
Les enfants adorent et le résultat est étonnant. Durant ce
mini-séjour, il y aura aussi eu un atelier de confection de chocolats
et un atelier de création de papier à lettres avec des feuilles
ramassées en forêt... Mais on est déjà l’après-midi
; il est temps de ranger, nettoyer... puis c’est le retour sur Cachan.
Violaine Ballet
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Une bonne partie du
groupe, près de la Fosse Dionne © C. Crémona,
2008
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La Fosse Dionne
© Cédric Crémona, 2008
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Les vignes du Clos
de Vaulichères © Thomas Le Roux, 2008 |
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Le gîte
de Chessy Les Prés © C. Crémona, 2009
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Tristan et Ulysse ©
C. Crémona, 2009
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Guy © C. Crémona,
2009
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