Topia
les ateliers du paysage
une association pour favoriser l'expression
de chacun
Le Petit Colombes dans
les Hauts-de-Seine
Mon paysage
quotidien ? Colombes. Île de France, au nord-ouest de Paris, au-delà
de La Défense. 80 000 et quelques âmes. J'y suis arrivée
fin 1998, je m'y sens bien… Je vis plus particulièrement dans le
quartier du Petit Colombes - réputé populaire.
Depuis
peu, à la maison de quartier on peut visiter l'exposition "Petit
Colombes : des sons pleins les yeux" : casque sur les oreilles, on écoute
les bruits du quartier (marché, crèche, cimetière,
bibliothèque…), et dans la salle à côté on regarde
des tableaux et dessins réalisés par des habitants, représentant
ce qu'ils retiennent du quartier.
Petit
Colombes, donc, mon quartier. Son paysage urbain est le reflet de sa population
passée, présente et en devenir…
Colombes
est la ville des Hauts-de-Seine qui possède aujourd'hui la plus
grande zone pavillonnaire : 9000 maisons - soit un tiers de l'habitat colombien.
Si dans le centre ville il y a de grandes demeures bourgeoises en meulière,
les maisons du Petit Colombes sont "ouvrières".
Datant des années
1920, elles sont en général construites sur des terrains
tout en profondeur et "en descente" - si bien qu'elles sont le plus souvent
sur trois niveaux, le plus bas étant inaccessible côté
rue mais accessible côté jardin. Elles sont étroites,
proches les unes des autres, et se ressemblent beaucoup - comme dans un
coron ? À l'intérieur, toujours la même architecture
: une entrée-couloir qui dessert d'un côté la cuisine
et de l'autre deux petites pièces dont au moins une équipée
d'une cheminée. A l'étage, deux à trois chambres,
une salle d'eau, et des combles non aménagées. Dans le jardin
: un potager, parfois un poulailler… |
|
Pavillon du Petit Colombes
@ Sonia Lemarchand (Topia),
2004
|
|
Les habitants de ces maisons ont tendance à vieillir, et après
leur départ ce sont des familles de classe moyenne qui s'y installent
et rénovent : abattement du mur entre les deux petites pièces
du rez-de-chaussée, aménagement des combles et du "sous-sol",
installation d'une terrasse et d'un escalier pour rejoindre le jardin directement
par le rez-de-chaussée…
Dans les années
1960, au Petit Colombes comme ailleurs, il faut construire pour accueillir
une population qui s'accroît, et construire grand. Les bidonvilles
poussés comme des champignons sont remplacés par des logements
collectifs : deux tiers de l'habitat colombien est collectif : pour
moitié privé et, pour l'autre moitié, des HLM construits
en bordure de ville.
Les propriétaires
des appartements privés sont pour la plupart issus de classes très
moyennes. Ils ont beaucoup investi pour ces logements - aussi la plupart
vivent-ils sur place, mais une tendance à la location se confirme. |
|
HLM du Petit Colombes
@ Sonia Lemarchand (Topia),
2004
|
|
A l'époque
conçus non seulement comme lieux d'habitation mais aussi comme lieux
de rencontre et de vie sociale, les HLM proposent des appartements grands,
et des "espaces de vie" et de verdure entourent les tours et les barres…
devenues aujourd'hui lieux anonymes et donc à la merci de la violence
et de trafics peu recommandables. La mairie tente de reconstituer un tissu
social en montant des maisons de quartier, mais la participation des habitants
- pour la plupart issus de l'immigration, et avec un fort taux de chômage
- mériterait d'être meilleure.
Aux élections municipales de 2001, la majorité passe à
droite, la politique communiste menée jusque là en prend
un coup… et entre autres, l'habitat évolue. Le POS (Plan d'Occupation
des Sols) avait déjà été revu et corrigé
pour permettre de détruire, d'agrandir et de reconstruire.
Abattement
de HLM, "périmètres d'étude" sur les zones pavillonnaires,
vente de terrains HLM, démarches de promoteurs immobiliers
auprès des personnes âgées vivant en pavillon… L'objectif
des années 2000 est clairement affiché : reconstruire
l'habitat à Colombes… et du même coup changer la population
?
Les classes
populaires ne trouvant plus d'appartement HLM à louer, vont-elles
émigrer au-delà de la Seine ? Les classes moyennes sont quant
à elles effarées devant la flambée des prix de l'immobilier. |
|
La Colomberaie
@ Christophe Lemarchand
(Topia),
2004
|
|
Mon paysage quotidien du Petit Colombes évolue et "s'homogénéise",
comme le boulevard qui mène à la Défense : bureaux
de standing, appartements couleur crème style moderne se succèdent…
La mairie veut faire de la partie colombienne du boulevard "Les Champs
Élysées de Colombes".
Heureusement, pour l'heure, la population n'est pas uniforme. Le paysage
urbain du Petit Colombes est un paysage humain : moi, enseignante, je côtoie
Papy Virgile - qui a trimé pour s'offrir son appartement -, Patrick
- cadre super supérieur qui loge dans une maison agrandie et adaptée
à sa famille de cinq enfants -, Madeleine - ouvrière à
la chaîne chez Renault depuis 40 ans, qui pour l'heure partage son
appartement HLM avec sa fille -, Lucienne - qui connaît tout le monde
car voilà 70 ans qu'elle vit dans sa petite bicoque de 2 pièces
héritée de ses parents… et j'allais oublier les "gens du
voyage" qui vivent dans ce qu'on n'ose pas appeler des bidonvilles, et
encore les SDF sortis tout droit du Centre d'Accueil des Sans Abris de
la région parisienne, intégré à l'hôpital
de Nanterre situé à 500 mètres de la place Aragon,
"cœur" du quartier…
Paysage
urbain à visage humain, donc… Je m'y sens bien car il ressemble
à chacun et à l'histoire de la ville et de notre société,
que je rêve et souhaite ouvertes et brassées !
Retour
à la rubrique "Mon paysage quotidien"
|